samedi 22 août 2015

L'Instant Kiwi: Auckland, Livre II


Je t’ai déjà dit qu’Auckland compte un million et demi d’habitants, et tu t’es peut-être dit « ah ouais, c’est assez grand ». Mais en réalité, sur l’échelle du pays, c’est ÉNORME. Ça fait un tiers de la population du pays entier.

(Proportionnellement, c’est comme si Paris comptait 22 millions d’habitants.)

Du coup, dans les nouvelles nationales, c’est quand même très souvent Auckland qui tient le crachoir (surtout dans les rubriques « Économie », « Business », « Sports » et « Faits divers »). Et le reste de la population a de plus en plus tendance à mépriser les Aucklandais, cf. la recrudescence ces dernières années du terme « JAFA », acronyme pour « Just Another Fucking Aucklander ».

Pourquoi tant de haine ? C’est simple : comme tout habitant des grandes villes, les Aucklandais ne se sentent pas pisser.

Du coup, vas-y que je te bloque toutes les routes du pays à chaque départ en vacances, vas-y que je me ridiculise auprès des Kiwis ruraux parce que j’ai jamais mis les pieds dans un champ de patates douces, et vas-y que je te rabaisse les locaux sans même m’en rendre compte à coups de « C’est mignon chez vous en province, c’est champêtre ». Bref, des grands classiques.


À ceci près que la dichotomie monde urbain/monde rural est quand même beaucoup moins marquée qu’en Europe, parce que, les Aucklandais ont beau vivre en ville, et certains d’entre eux ont beau essayer de toutes leurs forces de vivre un « urban lifestlye »,
ça reste quand même des bons gros ploucs.

(Sophistiqué mes couilles oui, CES GENS NE METTENT PAS DE CHAUSSURES.)

(À quel moment est-ce qu’on peut se voiler la face suffisamment pour s’imaginer être quelqu’un de branché, quand on fait partie des gens qui vont faire leurs courses pieds nus, escortés de mômes en pyjama ?)



(Les Aucklandais au supermarché, une illustration.)

Bref.

Toujours est-il que, quand Flaxou et moi on part crapahuter dans le bush, on privilégie l’aspect « On est des Français » plutôt que de dire « On vit à Auckland », ça évite qu’on se fasse traiter de JAFAs derrière notre dos.

(Car, gros avantage, les Français ont le droit d’être prout-prout.)

(Limite ils seraient déçus s’ils apprenaient qu’on fait aussi nos courses en pyjama, comme tout le monde.)

J’avoue qu’au départ, j’étais étonnée de la manière dont les Aucklandais sont perçus dans le reste du pays, parce qu’on parle quand même du tiers de la population totale, donc est-ce que ce n’est pas un peu se tirer une balle dans le pied que de détester en bloc un tiers de ses compatriotes ?

Et puis ensuite, j’ai vu le terme JAFA utilisé à Auckland. Genre, y’a une entreprise de taxis qui s’appellent JafaCabs, un bar qui s’appelle JAFA pub, et le New Zealand Herald (dont les bureaux sont basés ici) utilise souvent le terme comme synonyme d’ « Aucklandais » (sans connotation négative). Donc là, j’étais encore plus étonnée, jusqu’à ce que l’on m’informe que les Aucklandais avaient décidé de se réapproprier le terme JAFA, et d’en fait l’acronyme de « Just Another Fantastic Aucklander ».

Sérieusement ?

C’est un peu le coup du môme rejeté à l’école que personne n’invite aux anniversaires et à qui ses parents disent « C’est parce que tu es trop intelligente, tu intimides les autres enfants, mais en vrai tout le monde t’aime, Charlotte ».

(Flash info : ceci était une anecdote réelle.)

(Autre flash info : les parents sont des gros menteurs.)

Et donc, les Aucklandais ont décidé de se renommer « gens les plus géniaux et les plus cools du monde », parce qu’ils sont intimement persuadés que l’inimité ressentie à leur égard dans le reste du pays est en fait de l’envie, parce que tous les autres Kiwis sont jaloux de ne pas avoir le privilège de vivre à Auckland.

Donc maintenant je comprends un peu mieux pourquoi tout le monde les déteste.




(Bloody JAFAs.)

Il faut dire aussi qu’Auckland est une ville à part du reste de la Nouvelle-Zélande, et cette culture spécifique y est surement pour beaucoup dans son rejet.

Déjà, Auckland, c’est au Nord. Très au Nord. Donc rien qu’au niveau géographique, je conçois que ça puisse être assez balèze pour un gus de l’Ile du Sud de se sentir culturellement proche de gens qui vivent, non seulement a mille bornes, mais en plus sur une autre île, et même carrément dans un autre climat.

(Difficile pour le mec qui vit à Queenstown sous dix mètres de neiges éternelles de se farcir le JT National qui répète en boucle que l’autre jour, ouah dis donc, y’a eu un millimètre de grêlons à Auckland et même qu’ils ont mis au moins dix minutes avant de fondre complètement, zyva la panique totale.)

(Un peu comme toi et moi on rigole quand on voit le JT Français l’hiver, qui nous montre des Parisiens terrifiés par deux flocons de neige.)

Et l’autre facette de cette culture à part, c’est les habitants d’Auckland. Avec 40% de sa population née à l’étranger (contre 25% dans le reste du pays), Auckland concentre la quasi-totalité des immigrants en Nouvelle-Zélande – ce qui est logique, vu que c’est l’endroit où l’on trouve du travail le plus facilement : Wellington concentre majoritairement des emplois de la fonction publique (occupés par des citoyens uniquement) et Christchurch souffre toujours du contrecoup du tremblement de terre de 2011, et donc, à part les gens qui bossent dans la construction, plus personne ne veut y aller.

(En plus Christchurch c’est plein de skinheads, alors le choix est vite fait.)

Du coup, c’est pas étonnant que la majorité des gens immigrant en Nouvelle-Zélande se retrouvent à Auckland (fun fact : Auckland est la plus grande ville polynésienne du monde, en nombre d’habitants).

Et les Kiwis sont bien rapides à s’écrier que leur identité nationale complètement volée aux Anglais dès le départ se perd dans cet infâme melting pot… en oubliant que, la première source d’immigration à Auckland, ça reste les Kiwis eux-mêmes : parce que oui, rappelons-le, plus de 50 Néo-Zélandais déménagent à Auckland chaque jour, des étoiles plein les yeux et la tête pleine de rêves à l’idée de goûter enfin ce doux rêve urbain.



(Han, qu'est-ce que j'ai hâte de chausser mes bottes en caoutchouc pour marcher dans des rues pavées!)

Pour résumer : Auckland a un attrait paradoxal dans le reste du pays : d’un côté, les Aucklandais ont une super mauvaise réputation : on les juge hautains (alors que franchement pas), désagréables (alors que c’est les Bisounours les plus gentils du monde), et trop sophistiqués (LOL).

J’ai aussi entendu qu’il y a un cliché comme quoi les Aucklandais seraient de mauvais automobilistes, et tout ce que je peux dire là-dessus, c’est : sérieux, ne viens jamais en France.

(Rappelons que je n’ai toujours pas entendu le son d’un klaxon dans ce pays.)

(Pourtant je sais qu’ils existent, un jour j’ai utilisé le mien.)

(C’était par erreur, j’ai appuyé dessus en faisant une manœuvre pour entrer dans le garage.)

(Et j’ai failli mourir d’une crise cardiaque tellement je suis plus habituée à ce son.)

Bref.

Mais malgré cette mauvaise image, les Kiwis continuent de déménager en masse vers Auckland, principalement pour trouver du boulot (et arrêter de se geler les miches dans des maisons pas isolées au milieu de la neige, et/ou arrêter de se prendre des séismes sur le coin de la gueule).

Donc au final, Auckland, c’est une grande foule bigarrée, composée principalement de Néo-Zélandais, de Polynésiens, et d’Asiatiques. Et j’ai vanné les Aucklandais pour leur côté campagnard, mais on ne peut pas nier qu’Auckland a un aspect très urbain comparé au reste du pays : on trouve quand même des appartements en ville (une hérésie pour tout bon Kiwi qui se respecte) et il faut bien avouer que les divertissements sont plus à base de « Concert en plein air » et « Festival de cinéma » que « Concours de pêche à la truite » ou « Championnat de lancer de botte en caoutchouc ».

(Si si, ça existe → plus de détails sur ce beau sport ici)

(Y’a même le championnat du monde cette année en Italie, la vie de ma mère c’est vrai.)

(Et ici, c’est retransmis à la télé en live.)

(Les gens se lèvent au milieu de la nuit pour voir des paysans lancer des bottes dans un champ.)

(Ce pays, non mais sérieux.)

Alors, ça c’est pour le résumé des Aucklandais.

Mais au final, Auckland, ça ressemble à quoi ?

Eh ben c’est comme plein de petits villages tous collés les uns aux autres, et c’est d’eux qu’on va parler dans le prochain article.

Reste à l’écoute !



PS: Au fait, j'ai un compte Twitter maintenant! Bon, pour le moment, y'a rien dessus, parce que je suis encore en train de chercher à comprendre comment fonctionne Twitter (3615 vieille dame). Mais une fois que j'ai compris le schmilblick, je mettrai des liens vers les nouveaux articles, et des fois je t'écrirai des mots doux - si j'arrive à respecter la limite de caractères, et vu mon penchant pour l'épanchement, c'est pas dit.

Bisous sur ton chat!


(Et, si t'as un chien, gratouillage de derrières les oreilles sur ton chien.)

(Mais pas de bisous.)

(Les chiens ça pue.)

1 commentaire:

  1. Hahaha, je crois que ce que je vais retenir de cet article est que le Championnat de lancer de botte en caoutchouc existe ! :)

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